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Entrevistita à Gwen-Haël Denigot

By jpe 7 ans ago

Gz- Qu’est-ce qui vous fatigue dans le milieu du Tango ?
GHD- Les sectes, les nouveaux convertis, le repli sur des petits groupes persuadés de danser ou de jouer le « tango puro », le folklorisme, l’ignorance de l’histoire… Comme dans la vie quoi ! Mais aussi la distance qui existe entre le monde des danseurs et celui des musiciens, due aussi bien aux uns qu’aux autres, et que nous sommes de plus en plus nombreux à essayer de combler, à Paris avec la Contrandaza ou le Parloir, à Buenos Aires avec les milongas de Oliverio Girondo, du Torquato Tasso ou de Los Laureles de Barracas par exemple : des endroits de vie où se rencontrent danseurs, chanteurs et musiciens, et un public de tous âges avides de découvertes artistiques, dans une ambiance festive, qui redonne tout son sens à la définition du tango comme danse sociale.

Gz- Où et avec qui avez-vous découvert le Tango ?
GHD- Enfant et adolescente chez mes parents qui recevaient des exilés argentins pendant la dictature, comme les musiciens du Cuarteto Cedron. La musique du tango m’a toujours accompagnée, tout comme l’imaginaire littéraire, mais je me suis mise à danser sur le tard, vers 40 ans, après avoir été fascinée par la connexion des couples dans une milonga en plein air à Marseille. Pour moi ex-philosophe ayant travaillé sur l’altérité, c’est le rapport à l’autre qui m’a attirée, la possibilité de créer du proche avec du lointain ; l’un, l’autre et la musique.

Gz- Pour vous où se joue l’avenir du Tango ?
GHD- Il y a depuis une dizaine d’années à Buenos Aires une effervescence dans le monde de la musique dont on a peu idée ici, à tel point qu’on a pu parler de « nouvel âge d’or » du tango. Pour moi le tango actuel se joue là, et nous sommes nombreux à espérer que des danseurs créatifs comme on pu l’être les milongueros par exemple au temps de D’Arienzo qui a opéré une rupture dans la musique, s’emparent de ces arrangements contemporains pour inventer le tango dansé du XXIe siècle.

Gz- Un bon et un mauvais souvenir de Tango ?
GHD- Mauvais souvenir je ne sais pas, mais mauvaise expérience : quand un danseur avec qui tu rêves de danser sur Pugliese t’invite sur… ponele Biagi ou Varela !

Un bon souvenir : Un jour de coupure de courant à Sunderland, quand on a dansé a media luz, voire dans l’obscurité totale, toute la nuit, le seul générateur pour le DJ, comme un « cierre de la Viruta » qui dura 5 heures ! Dans cette milonga familiale, temple du tango Salon, mais où on va pour voir et être vu, connaître et être reconnu, encore plus qu’ailleurs, ne sont restés que les super fidèles en solidarité avec les organisateurs et ont crée une sorte de « communauté de destin » : tout le monde s’invitait comme à colin-maillard, et on a vu (ou pas !) des milongueros danser avec des femmes qu’ils n’invitent jamais, d’autres s’essayer à des figures soi-disant interdites sur la piste de Sunder, l’art du chamuyo porté son comble, les danseurs apprécier de danser pour eux seuls dans l’intimité de l’anonymat tout en frôlant et communiquant avec les autres couples : la milonga parfaite dans le genre traditionnel déjanté !

Gz- 3 Tangos / 3 orchestres / 3 danseurs
GHD-  « Danza maligna », Henrique Rodriguez, parce que c’est une définition très précise du tango.
« Sur », parce que Manzi, parce que Troilo, El Polaco, Solanas… et parce qu’une bonne partie de la meilleure musique actuelle vient des quartier sud (Sur) de Buenos Aires.
« Anclao en Paris » (Cadícamo), parce que je me reconnais sans doute dans cet « errante bohemio »  moi qui ai vécu autour du monde, qu’on me le chante souvent, que c’est une trace du lien fondateur entre Paris et Buenos Aires, et que l’exil est une source inépuisable et universelle de poésie.

3 orchestres :
Pour danser : Pugliese, D’Arienzo (con Echagüe) , Di Sarli
Pour écouter : Astillero, Rascasuelos, duo Dipi Kvitko- Chino Laborde

3 danseurs/danseuses :
Trois milongueros contemporains, qui sont devenus professionnels par reconnaissance du public mais qui ne sont pas des danseurs de formation, et qui ont le tango proprement chevillé au corps :
Javier Rodriguez
Andres Laza Moreno
Noelia Hurtado

Gz- Quelle est la meilleur manière de terminer une Milonga ? Choisissez :

a) 
Les pieds douloureux après avoir tant dansé
b) A la recherche d’une « after » pour continuer.
c) En allant prendre un petit déjeuner.
d) Avec quelqu’un
e) Autre, (précizez) :

Une milonga qui ne se termine pas parce que les musiciens du concert et tous les autres qui se joignent au fil de la soirée se mettent à improviser, font le « bœuf », « la recalada » jusqu’à 8 ou 10h du matin.

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